Le trouble du spectre de l’autisme
Nicola Rudelli, chargé d’enseignement SUPSI (DFA) et pédagogue chez la Fondation ARES
Le Trouble du Spectre de l’Autisme (TSA) est un trouble neurodéveloppemental complexe et hétérogène, biologiquement déterminé et fortement lié à des facteurs génétiques (Tick et al., 2016), dont les symptômes apparaissent généralement vers l’âge de 8-12 mois, bien que chez environ un tiers des enfants atteints de TSA, “le développement semble normal au cours des premières années de vie, suivi d’une perte de capacité entre 1 et 3 ans” (Bernier et al., 2021, p. 9). Dans la grande majorité des cas, le diagnostic peut être posé avant l’âge de 3 ans et, en règle générale, les diagnostics établis à partir de 18-24 mois à l’aide des instruments validés actuellement disponibles (par exemple, ADOS, ADI-R) sont stables dans le temps.
Sa prévalence est communément estimée à environ 1% de la population (APA, 2013), bien que certaines études rapportent des prévalences plus élevées (par exemple Baio et al., 2018), et elle concerne, dans environ 75% des cas, des individus de sexe masculin (Loomes et al., 2017).
Les déficiences typiques des TSA touchent à deux aspects principaux (APA, 2013) : un déficit durable de la communication et de l’interaction sociale, dans différents contextes et non explicable par rapport à un retard de développement généralisé, et un schéma de comportements, d’intérêts ou d’activités restreints et/ou répétitifs. Le premier aspect concerne, par exemple, les différences dans le traitement des informations sociales et de la communication non verbale, la difficulté à participer à une conversation normale, à partager ses intérêts et ses émotions de manière réciproque, ainsi que la capacité à développer et à entretenir des amitiés adaptées à son niveau de développement. Le second aspect concerne, par exemple, une adhésion excessive aux routines, liée à la rigidité cognitive et au besoin de fixité, la présence d’un langage et/ou de mouvements moteurs stéréotypés (répétitifs), et la présence d’intérêts restreints qui peuvent être inhabituels dans leur intensité ou leur contenu. Ces caractéristiques sont souvent associées à des anomalies ou des particularités sensorielles, dont le type et l’intensité peuvent varier considérablement d’un individu à l’autre.
Il est essentiel de garder à l’esprit que les caractéristiques décrites varient énormément d’un individu à l’autre et que, pour cette raison, on parle de “spectre”. La gravité avec laquelle l’affection se manifeste est classée en trois niveaux différents (APA, 2013), en fonction du degré de soutien dont la personne a besoin. En raison de l’ampleur des manifestations des TSA, il est donc nécessaire d’avoir une approche ouverte et curieuse de la diversité de ce trouble.
Il y a des personnes qui peuvent vivre et travailler de manière indépendante, alors que d’autres n’atteindront jamais ce degré d’indépendance ; il y a des personnes qui développent un langage verbal adéquat pour communiquer dans la vie quotidienne et d’autres qui ne développent aucun langage. Certaines pathologies sont souvent associées aux TSA. Il s’agit notamment de la déficience intellectuelle, du trouble du déficit de l’attention/hyperactivité (TDAH), de certains problèmes émotionnels, comme l’anxiété ou les troubles de l’humeur, et de problèmes médicaux, comme les troubles du sommeil, les troubles gastro-intestinaux et l’épilepsie. Ces troubles ont un impact important sur le bien-être et la qualité de vie de la personne, et il est donc conseillé de les connaître et de les identifier, afin de pouvoir apporter l’aide nécessaire, en évitant de les attribuer arbitrairement au TSA.
Les caractéristiques décrites ont un impact sur les processus d’apprentissage, et les personnes avec TSA présentent fréquemment des difficultés comportementales, qui peuvent trouver leur origine à la fois dans des éléments personnels, par exemple l’incapacité à satisfaire ses besoins par une communication efficace (Hutchins et Prelock, 2014), des difficultés d’autorégulation, de compréhension et de gestion de ses émotions (Bernier et al., 2021), et dans des éléments environnementaux (Magerotte et Willaye, 2007).
Les difficultés et les particularités décrites persistent généralement tout au long de la vie ; malgré cela, elles s’accompagnent, pour chaque personne, d’une évolution et d’une acquisition de capacités, avec des rythmes et des trajectoires différents et variés. La thérapie privilégiée pour les TSA est l’éducation, et des progrès considérables ont été réalisés dans l’identification des modalités qui peuvent être les plus utiles pour favoriser le développement des personnes atteintes de TSA. Les techniques d’intervention efficaces comprennent les approches cognitivo-comportementales et des résumés d’interventions dont l’efficacité a été prouvée sont régulièrement publiés (voir, par exemple, Steinbrenner et al., 2020). Aujourd’hui, il existe un consensus sur le fait que l’accent, au-delà du diagnostic, doit être mis sur les forces, les faiblesses et les styles d’apprentissage de chaque individu, afin de pouvoir planifier des interventions personnalisées qui tiennent compte des différents contextes de vie de la personne et des éventuels changements à apporter à l’environnement, tant physique que social.
Bibliographie
APA (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders (5th ed.). American Psychiatric Association.
Baio, J., Wiggins, L., Christensen, D. L., Maenner, M. J., Daniels, J., Warren, Z., … & Dowling, N. F. (2018). Prevalence of autism spectrum disorder among children aged 8 years—autism and developmental disabilities monitoring network, 11 sites, United States, 2014. MMWR Surveillance Summaries, 67(6), 1.
Bernier, R.A., Dawson, G., & Nigg, J.T. (2021). La scienza dei disturbi dello spettro dell’autismo. EDRA.Hutchins, T. L., & Prelock, P. A. (2014). Using communication to reduce challenging behaviors in individuals with autism spectrum disorders and intellectual disability. Child and Adolescent Psychiatric Clinics, 23(1), 41-55.
Loomes, R., Hull, L., & Mandy, W. P. L. (2017). What is the male-to-female ratio in autism spectrum disorder? A systematic review and meta-analysis. Journal of the American Academy of Child & Adolescent Psychiatry, 56(6), 466-474.
Magerotte, G., & Willaye, E. (2014). Evaluation et intervention auprès des comportements défis: Déficience intellectuelle et/ou autisme. De Boeck Superieur.
Steinbrenner, J. R., Hume, K., Odom, S. L., Morin, K. L., Nowell, S. W., Tomaszewski, B., … & Savage, M. N. (2020). Evidence-Based Practices for Children, Youth, and Young Adults with Autism. FPG Child Development Institute.Tick, B., Bolton, P., Happé, F., Rutter, M., & Rijsdijk, F. (2016). Heritability of autism spectrum disorders: a meta‐analysis of twin studies. Journal of Child Psychology and Psychiatry, 57(5), 585-595.
Élèves présentant un trouble du spectre autistique en classe : que peut faire l’enseignant ?
Il n’existe pas de recette pour accueillir au mieux un élève présentant un trouble du spectre autistique dans la classe. Les enfants présentant un TSA peuvent présenter des caractéristiques très différentes et chaque cas doit donc être évalué individuellement. Il est important de consulter des spécialistes pour obtenir des indications.
En Suisse romande, il existe un certain nombre d’organisations auxquelles il est possible de se référer :
En parler en classe
Dessin animé et livre
Le Roi du Marché
Gionata Bernasconi, Joel Fioroni, Nicola Rudelli et Pietro Mariani
L’histoire commence dans la ferme de M. et Mme Piantafico, avec la naissance de Giovanni. Sa croissance est suivie de façon curieuse par les poules du poulailler, qui sont les premières à repérer certaines caractéristiques un peu bizarres à leurs yeux. Dès lors, pour les poules, la paix semble être terminée. Ce fait bouleverse tellement la communauté du poulailler que, pour étudier le problème, les poules commencent à écrire un journal et à voir le monde avec des yeux différents. Cependant, ce qui est mis sous la loupe dans ce récit, ce n’est pas l’autisme de l’enfant, mais notre regard sur son comportement. Nous sommes donc tous les vrais protagonistes, représentés comme une métaphore par des poules.
Le coffret se compose de 4 livrets (italien, allemand, français et anglais), contenant l’histoire et des fiches détaillées spécialement conçues pour les enfants, et d’un DVD, contenant le court-métrage basé sur l’histoire de Giovanni, un parcours pédagogique à suivre en classe avec les élèves et une série d’entretiens avec des experts du domaine.
L’histoire est conçue pour parler du trouble du spectre de l’autisme aux frères et sœurs, ou en classe, notamment au niveau de l’école primaire et secondaire, avec des degrés d’approfondissement variables selon le parcours de l’enseignant. Pour en savoir plus, visitez la page dédiée sur le site de la fondation ARES, où vous trouverez des informations supplémentaires et des exemples pour parler d’autisme aux enfants.
Film d’animation
Mon petit frère de la lune
Film d’animation de Frédéric Philibert
Une sœur parle de son petit frère qui est un peu particulier, à tel point qu’il semble venir… de la lune ! Ce récit riche en spontanéité peut être un repère supplémentaire pour expliquer le trouble du spectre de l’autisme aux enfants de manière simple et directe.